Le concours Ingénieuses 2021, organisé par la CDEFI (Conférences des Directeurs des Écoles Françaises d’Ingénieurs), a pour objectif d’éveiller ou de renforcer au sein des écoles d’ingénieurs françaises la lutte contre les stéréotypes et comportements sexistes, de promouvoir les formations et métiers de l’ingénierie auprès des jeunes filles et d’agir pour l’égalité Homme/Femme autant pendant les études qu’en entreprise.

Le prix Femme Ingénieure récompense deux femmes ingénieures en activité pour leurs engagements. C’est pour ce prix qu’Amélie Ramet, diplômée ENSIC 2006, a été nommée en avril, pour ses engagements pour la mixité et la diversité.

L'ENSIC est fière de voir l'une de ses diplômées incarner de très belle façon la cause de la parité Femmes-Hommes dans le monde des écoles d'ingénieurs, et ceci d'autant plus que l'École est sans aucun doute l'une d'entre elles qui, depuis le plus longtemps, l'a mis en pratique pour son plus grand succès et celui de ses diplômé.e.s.

À l’occasion de cette nomination, nous avons demandé à Amélie Ramet de répondre à quelques questions :

 

Quel a été votre parcours depuis votre diplôme de l’ENSIC en 2006 ?

En sortant de l’ENSIC, j’ai eu la chance d’intégrer une entreprise de l’industrie cimentière dans laquelle j’ai fait un parcours « jeune cadre » où pendant un an j’ai fait le tour de toutes les activités de l’entreprise. Pour une personne qui débute sa carrière c’est vraiment enrichissant et je suis très contente d’avoir fait ce type de parcours.
J’ai fait du développement de produits spéciaux dans le domaine du béton prêt-à-l’emploi, dans l’adjuvantation. J’ai ensuite rapidement voulu m’orienter dans le management d’équipe. J’ai alors intégré une nouvelle entreprise en tant que responsable qualité pendant sept ans, dans laquelle je manageais une équipe technique d’hommes, les deux seules autres femmes, je les ai embauchées par la suite. J’y gérais une vingtaine de personnes à 26 ans.
Après, j’ai intégré, il y a cinq ans maintenant, un poste de cheffe de secteur, manager de centres de profit. J’ai donc quitté la technique pure pour être cheffe d’agence. De même dans cette entreprise, je ne manageais que des hommes et c’est un milieu très masculinisé. La seule femme, avec moi, était mon assistante. C’est vrai que j’ai évolué dans des filières plutôt masculinisées.
En septembre 2020, j’ai décidé de reprendre un cursus universitaire : je suis en Master 2 IMEDD (Ingénierie et Management de l’Environnement et du Développement Durable) à l’Université Technologique de Troyes et en ce moment je suis en stage en écologie industrielle et territoriale.
En parallèle, j’enseigne depuis cinq ans à l’ESTP Paris campus de Troyes en matériaux et je fais de la coordination pédagogique pour une nouvelle promotion qui vient d’ouvrir.

J’accompagne également depuis un moment des jeunes à la Mission Locale, c’est-à-dire que ce sont des jeunes qui sont en recherche d’emploi ; je fais partie d’une association d’entraide et de partage entre femmes porteuses de projets ou entrepreneuses Créez comme Elles
Dans mon ancienne entreprise aussi, j’avais été à l’origine d’un partenariat avec Capital Filles qui est une association qui propose aux employées d’être marraines de jeunes filles plutôt issues de milieux défavorisés pour les aider dans le choix de leurs orientations vers l’enseignement supérieur.  

Vous avez donc évolué dans un monde très masculin !

C’est vrai que j’ai choisi l’industrie cimentière en sachant que c’était un domaine masculinisé. Ça me plaisait, l’aspect franc de ces industries et leurs politiques d’entreprises. Je n’avais pas l’idée que ça allait être compliqué en tant que femme et je ne m’étais même pas posée la question ! Il a fallu un jour, un entretien avec l’un de mes managers qui m’a dit que je ne pourrais pas avoir le poste que je souhaitais car la personne précédente était une femme et que ça s’était mal passé. Aujourd’hui cela peut paraître hallucinant, enfin j’espère, mais ça a été un choc. Je ne pouvais pas lutter ou acquérir de nouvelles compétences. 
Ça a été un déclic pour moi, le fait d’être une femme fait partie du tableau. Après j’ai vraiment voulu apporter de la diversité dans mes équipes parce que je me suis rendue compte qu’on se faisait une idée, un profil du type d’employé.e que l’on cherche, pour une infirmière on imagine une femme, un technicien un homme. J’ai toujours essayé de lutter pour qu’il n’y ait pas de profil type dans les postes parce que sinon on s’enferme.
Pour moi, il y a un risque si on suit ces schémas : on n’embauche qu’un seul type de personne et donc une seule vision. Ce qui est intéressant, c’est la diversité dans une équipe, cela apporte une vraie valeur ajoutée.

Quels sont vos engagements aujourd’hui ? Comment avez-vous postulé pour ce prix ?

Je ne connaissais pas le prix avant cette année ! C’est la responsable pédagogique de l’ESTP à Troyes avec qui je travaille qui m’y a encouragée, car elle connait mes engagements. J’ai donc monté un dossier. Ce qui m’a motivée, c’est qu’avec ce prix, il y a des tables rondes organisées auprès de collégien.ne.s et lycéen.ne.s et ça m’a plu de pouvoir sensibiliser les jeunes filles aux métiers de l’ingénierie, parce que j’y crois ! Je pense que c’est nous qui allons créer les programmes, les process et les usines de demain. Je suis engagée dans la transition écologique et pour moi cela va ensemble.

Que diriez-vous à une jeune fille/femme pour la convaincre que la science n’est pas une affaire d’homme ?

Je vois deux raisons :
- C’est l’affaire de tout le monde ! La science et l’ingénierie en général vont nous proposer une boîte à outils pour faire évoluer le monde et pour qu’il s’adapte aux défis qui nous attendent. Et si on veut comprendre le monde qui nous entoure, le modifier ou l’adapter, et être acteur de cette adaptation, c’est vers les sciences et l’ingénierie qu’il faut se tourner. La diversité est importante pour cela.
- Je vois aussi un réel danger à ce que ce ne soit que des hommes, souvent le même profil et les mêmes origines sociales, qui vont construire les algorithmes de demain, construire les applications de nos téléphones de demain, construire les réseaux sociaux de demain … et s’ils le construisent avec une seule façon de penser, on en sera exclu.e.s parce qu’on ne sera pas dans le même modèle de pensée.

 

Remise des prix le 20 mai de 14h à 18h, précédée le 18 mai de tables-rondes animées par les nominées devant des classes de collèges et lycées. À suivre !

Plus d’infos : http://www.cdefi.fr/fr/actualites/ingenieuses-2021-le-jury-devoile-les-nominees

À noter, l’ENSIC est partenaire de l’association Elles Bougent dont la principale ambition est de renforcer la mixité dans les entreprises des secteurs industriels et technologiques.